Les hymnes du Rig Veda, considérés comme le plus ancien corpus littéraire de l’humanité, offrent une fenêtre unique sur une époque bien antérieure à l’émergence des grandes cités de la civilisation des 7 Rivières, connue sous le nom de civilisation de l’Indus-Sarasvatî. En particulier, les mandalas 2, 3, 4, 5, 6 et 7 sont souvent considérés comme les plus anciens et relatent des évènements marquants de cette époque pré-urbaine. Ces textes décrivent un monde où les communautés humaines étaient organisées autour de clans vivant en harmonie avec la nature et confrontées à des luttes mythiques et réelles.
Une Société Clanique et Pastorale
Les hymnes védiques évoquent une société fondée sur l’élevage et l’agriculture, avec une forte dépendance envers les forces naturelles. Les clans y sont dépeints comme des unités sociales autonomes, dirigés par des chefs charismatiques (“rājas”). Le rôle du sacré est central dans la vie quotidienne, avec des rituels destinés à apaiser les dieux et à assurer la prospérité. Le feu sacré (“Agni”) et le Soma, un breuvage mystique, occupent une place prépondérante dans ces pratiques.
Les descriptions des hymnes montrent une économie basée sur l’élevage de bovins, qui étaient non seulement une source de subsistance mais aussi une unité de richesse et un enjeu de conflits. Les termes védiques comme “go” (vache) apparaissent fréquemment et soulignent l’importance de ce bétail dans les échanges et les offrandes rituelles.
Les Mandalas du Rig Veda et leurs Contextes
Les Mandalas 2 à 7 : Chroniques de l’Âge Pré-urbain
Les mandalas 2, 3, 4, 5, 6 et 7 sont considérés comme les plus anciens et racontent des évènements majeurs d’une époque antérieure à la phase urbaine. Ils relatent des luttes mythologiques et historiques telles que :
- La Légende de Vṛitra : Indra, le dieu guerrier, tue le dragon Vṛitra pour libérer les eaux. Cet épisode symbolise probablement une sécheresse due à un super-volcan qui a obscurci le ciel, il y a environ 7300 ans
- Les Conflits avec Shushna et Shambara : Ces ennemis, souvent dépeints comme des chefs d’autres clans ou tribus, illustrent les tensions entre groupes pour le contrôle des ressources. Shushna symbolise une grande sécheresse ayant eu lieu probablement il y a 8200 ans lors du grand refroidissement général de l’hémisphère nord.
- La Guerre des Dix Rois : Cet événement épique, décrit dans le Mandala 7, montre une coalition de tribus affrontant le roi Sudas, reflet des alliances et rivalités de l’époque.
Le Premier Mandala : Une Compilation Variée
Bien qu’il contienne des hymnes très anciens, le premier mandala inclut aussi des compositions de périodes variées. Il reflète une synthèse de traditions orales transmises sur plusieurs générations.
Le Huitième Mandala : Transition vers l’Urbanisation
Datant probablement du début de la phase urbaine, il y a environ 5500 ans, ce mandala montre des évolutions dans les pratiques et les mentalités. Les hymnes y reflètent une société en mutation, avec des éléments qui préfigurent l’organisation urbaine.
Le Neuvième Mandala : Le Soma comme Axe Central
Entièrement consacré au Soma, ce mandala rassemble des hymnes provenant de toutes les époques et familles de rishis. Sa compilation remonte probablement à avant 2200 av. J.-C., date de la grande sécheresse qui aurait marqué la disparition du Soma originel, souvent identifié comme le Psilocybe cubensis.
Le Dixième Mandala : Une Fin de Cycle
Composé aux alentours de 2000 av. J.-C., ce mandala reflète les derniers moments de la civilisation védique classique. Les rishis responsables de ces hymnes appartiennent à une nouvelle génération, avec quelques exceptions liées à des lignées anciennes. Ce texte témoigne de changements sociaux et spirituels après la disparition du Soma originel.
Conclusion
Les hymnes védiques des différents mandalas offrent un récit évolutif d’une société en transition, passant d’un mode de vie pastoral et clanique à une organisation pré-urbaine puis urbaine. Ces textes sont autant des archives mythologiques que des reflets historiques, permettant de comprendre les mutations culturelles et économiques qui ont précédé l’émergence des grandes cités de la vallée de l’Indus-Sarasvatî. Leur étude continue de révéler les racines profondes de la civilisation indienne.

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